Hommage à Raoul Servais, pionnier du film d’animation belge.

Raoul Servais est reconnu internationalement comme l’un des pionniers du film d’animation belge. On lui doit de nombreux courts métrages, notamment “Harpya“, Palme d’or du court métrage à Cannes en 1979. L’homme, décédé dimanche à l’âge de 94 ans, a remporté plus de 50 prix et distinctions cinématographiques internationaux.

Raoul Servais est né le 1er mai 1928 à Ostende. Il a étudié à l’Académie royale des Beaux-Arts de Gand. Dans la section arts appliqués, Raoul Servais touche à tout : affiches, projets de peintures murales, de vitraux, cartons de tapisserie… Sorti de l’Académie, il fait une rencontre déterminante, celle de Maurice Boel, un peintre ostendais avec lequel il remet à flot le Ciné-Club d’Ostende, véritable institution créée par le cinéaste Henri Storck et le peintre surréaliste Félix Labisse.

Sur les traces de son père qui filmait en amateur, Raoul Servais va se lancer dans le cinéma d’amateur, en prise de vues réelles. Vers 1952, il tourne en 8 millimètres un petit documentaire sur son ami, le peintre Boel.

1960 est une année décisive. Raoul Servais devient professeur d’arts appliqués à l’Académie de Gand. “Il va pouvoir se rendre disponible à son grand dessein, la réalisation d’un film d’animation, auquel il travaille depuis 1957“, précise le Fonds Raoul Servais. C’est au sein de cette Académie qu’il fondera en 1963 une section “animation“, créant ainsi une première école du genre en Europe. Il dirigera ce département jusqu’à ses 70 ans.

Marié et père de deux enfants, Raoul Servais a également enseigné à l’école supérieure des arts visuels de La Cambre à Bruxelles, à l’Institut des Arts de Diffusion (IAD) et au Centre Tertiaire de Formation à Valenciennes.

Depuis ses débuts en 1950, Raoul Servais a tourné une quinzaine de films. Parmi les nombreux prix engrangés, trois balisent la carrière et le cheminement de l’artiste : le premier prix du film d’animation au Festival d’Anvers en 1960 (“Havenlichten” – “Les Lumières du port“), le prix du film d’animation du Festival de Venise en 1966 pour “Chromophobia” qui lui apporte la consécration internationale, et la Palme d’Or du court métrage au Festival de Cannes en 1979 pour Harpya, un mélange d’images filmées et de dessins animés qui annonce son seul long métrage “Taxandria” (1994).

En 2010, Harpya est repris dans le classement des dix meilleurs films d’animation établi par un jury international, parmi plus de 800 films, à l’occasion du 50e anniversaire de l’ASIFA (Association internationale du film d’animation), que Raoul Servais a présidée de 1985 à 1994.

Raoul Servais a également reçu au festival d’animation d’Annecy le Grand Prix et le prix de la critique internationale pour “Nachtvlinders” (“Papillons de nuit“, 1998), qui reconstitue en huit minutes le monde du peintre Paul Delvaux. C’est le seul film à avoir été tourné intégralement en “Servaisgraphie“, un procédé initié par l’artiste et permettant une incrustation de vues réelles dans un décor dessiné. La technique est aujourd’hui devenue obsolète face à l’évolution de la technologie numérique, explique le Fonds Raoul Servais.

D’autres distinctions ont encore été octroyées à l’artiste lors de festivals en Belgique et à l’étranger (Bilbao, Téhéran, Montréal, Leipzig, Moscou, Chicago, Philadelphie, Sydney, Oberhausen, Zagreb, Porto, Rome, Valladolid…). A 80 ans, le réalisateur est fait docteur honoris causa de l’université de Gand. Il reçoit ce prix “en couronnement de la reconnaissance internationale de son œuvre, pour souligner son engagement dans la société et pour sa contribution à l’enseignement académique du cinéma en Flandre“. En 2010, il a encore reçu la médaille d’honneur d’or (Gouden Erepenning) du Parlement flamand. Il est encore honoré pour sa carrière lors du festival du film d’Ostende en 2018 et reçoit un Magritte d’honneur en janvier 2019.

En 2015, sort “Tank“, un film antiguerre qui a gagné un Épi d’argent au festival du film de Valladolid. Le réalisateur y livre une interprétation personnelle des premières attaques avec des tanks lors de la Première Guerre mondiale. C’est encore le premier conflit mondial qui servira de cadre à son 16e court-métrage “Der Lange Kerl“, sorti en 2021.

En 2018, une aile consacrée à Raoul Servais a ouvert au Mu. ZEE à Ostende.

Quant à ses archives, quelque 200 pièces parmi lesquelles de nombreuses œuvres graphiques et objets utilisés pour ses films, l’artiste les a remises en 2019 à la Fondation Roi Baudouin. Celle-ci lui consacrera l’exposition “Raoul Servais. Un univers entre magie et réalisme” au Musée BELvue à Bruxelles en 2021.

Source : Site de la RTBF