Accord sur les droits d’auteur, le ministre des Finances obtient gain de cause

La négociation a été tendue, mais le ministre des Finances a obtenu gain de cause : c’est le même projet de réforme des droits d’auteur, approuvé en première lecture, qui est soumis ce vendredi au gouvernement.

Journaliste au service CulturePar Alain LallemandPublié le 18/11/2022

Les négociations en intercabinets n’ont pas suffi : il a fallu que le texte remonte ce jeudi en réunion des chefs de cabinets (le DAB, directeurs algemeen beleid) pour qu’un accord soit trouvé. Mais le résultat est là : le projet de loi-programme réformant notamment les droits d’auteurs et droits voisins (Le Soir du 25 octobre) sera soumis ce vendredi en seconde lecture au gouvernement, essentiellement sous la même forme qu’il avait début novembre lors de son passage en première lecture. C’est bien le même texte, préparé par le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V), qui sera examiné et devrait être adopté ce vendredi par le gouvernement.

De manière assez prévisible, la tension au sein des partis du gouvernement était telle qu’une modification substantielle d’un point aurait réduit le consensus à néant – et accessoirement le rendement budgétaire qui en était attendu. Le texte proposé en seconde lecture conserve donc deux mesures qui vont faire mal à des catégories très différentes de travailleurs/employeurs. La première est l’exclusion de facto de la majeure partie des employés IT et des architectes, puisque les œuvres couvertes devront être destinées à « une communication au public, ou de son exécution ou de sa représentation publique ». Cela signifie qu’un programmeur de jeux informatiques pourrait très bien développer une carrière d’artiste et bénéficier du régime dérogatoire du droit d’auteur, mais il s’agit là d’un profil exceptionnel dans l’univers de la tech’. La très grande majorité des travailleurs développent des produits B to B qui n’ont certainement pas vocation à être rendus publics. Idem pour les architectes : si l’œuvre est artistique et publique, il peut y avoir droit d’auteur mais pas pour une prestation ne bénéficiant, par exemple, qu’à un client privé.

L’autre point qui fera mal est parafiscal et touche une tout autre population : lors des prestations-cessions, un ratio 70/30 est maintenu. En clair, lorsque l’auteur est rémunéré à la fois pour une prestation ponctuelle et pour les droits d’auteur et droits voisins qui y sont attachés, il devra s’acquitter de cotisations sociales sur 70 % de la rémunération totale – considéré ici comme le revenu de la prestation – et ne pourra percevoir qu’au maximum 30 % en droits d’auteur. Il est entendu que les droits perçus sur l’exploitation constante d’une œuvre, notamment via les sociétés de gestion collective, continueront, eux, à être admis à 100 % comme droits d’auteur.

Ce ratio 70/30 était contesté tant par les journalistes indépendants que par les auteurs de l’industrie audiovisuelle et du cinéma. Ces deux professions, déjà sous-payées, sont généralement rémunérées selon un ratio 50/50. Il existe même desrulings (décisions fiscales anticipées) de 2022 qui approuvent ce ratio pour les années à venir. Selon nos informations, non seulement le ratio 70/30 est maintenu, mais la date de l’entrée en vigueur de cette section de la loi-programme est maintenue au 1er janvier 2023. La seule disposition qui semble négociable serait une éventuelle période de transition, comme il en est prévu pour les professions de facto exclues de ce régime.